Subjective Vision is a collection of portraits of visual artists, created and directed by Lionel Samain.
Subjective Visions, an artist's perspective on artists, the fictional account of the intimacy of the creative gesture.
I have a passion for documentaries. Especially for films that deal with art. Unfortunately, I very rarely find there what attracts me to this subject, namely the artist's relationship with his work, the journey of creation, perceived from within. Often the treatment of a film about an artist is made up of historical and social elements, stitched together with expert analysis and contemporary testimonies who fail to capture the intimate dimension of the creative act. We communicate about the artist, rather than penetrating his universe, in order to experiment, in an organic and intuitive way, the way in which he shapes the material, the gestures he takes to develop his work, his intellectual and emotional journey, in short.
My documentary approach echoes the approach of David Hockney, in his book “Secret Knowledges of old masters”, where the painter talks about the history of art, from the point of view of the one who makes art, evoking the artists' perspective on reality and the constraints they encounter in their practice. This desire to draw a new world to escape reality, this accomplishment of the creation of the work, this ordeal sometimes, only artists know about it. And despite everything, what I have seen a lot are artists who gloser over their work, as if to better fit it into the pre-built boxes of the history of art.
How do I go about bringing to the screen, without background noise, without intellectual jargon, this very singular approach, of which the artist himself struggles, perhaps out of modesty, to express the depth and sincerity? How to show the artist's doubt, in relation to the risks to be taken, his questioning of his place in the world, this dance of the creative spirit, visiting the interior of his psyche to find the meaning of his life? By avoiding the monograph, while relying on my experience as a portrait photographer.
When I photograph someone, despite the brevity of the meeting, I always capture a piece of their soul, despite the image they have of their own representation in the eyes of the world. Thus, the Subjective Visions are portraits of the artist as an artist, of the author in action rather than in meta-reflection, in the matter of his doubts and his glory, of his fight against reality. In the Subjective Visions, during the few minutes in which the artists engage, a tension is seized. They entrust their strategies for drawing a world conforming to their dreams, when they are facing the canvas. Sharing the intimacy of pictorial creation is a rare subject. It is to share the little song that trots at the bottom of the painter's head, all the time he is holding the brush. Capture his silences, his spontaneous words, his psychological and philosophical relationship to the work, the story he tells himself. In short, his conscience. And from this material, to shape a story, which is suspense and passion.
To create, for a visual artist, is not to reproduce reality, automatically or systematically, but to transpose what is in three dimensions onto a two-dimensional plane. It is to invent what does not exist. It is an arbitrary artistic choice, the fruit of all the decisions that the author takes to get out of the grip of the real and succeed in his escape from the tangible. The Subjective Visions proceed from the same process. So I use rotoscoping and paper support to transfigure the portrait onto a material allowing the incarnation of the sensual and expressive gesture.
Apart from the presentation of the works, shown as they are in the films, the aesthetic of Subjective Visions is based on frame-by-frame animation work, on the principle of rotoscope. In practice, documentary shots are “live”. Then, each pre-assembly photogram is printed and animated, by hand, using a technique that varies, depending on the universe of the artist and the film. It can be tears or watercolor coloring, etc.
Why do I use paper in my work? The painter figures what the world should be on his canvas and I transpose this gesture as I feel it on paper. This material makes it possible to find the authentic gesture of the painter and the brush on the canvas. Constraining the narrative to the two dimensions of the paper opens the field to visual experiments which enrich the story with new dimensions over the long term. But the Subjective Visions are not just a pretty aesthetic case to deliver a testimony, they participate in the creation of the fictional narrative of art. The artist facing creation must be shown as an obsessive adventure, a story for all, that of the hero’s quest, in an extraordinary plastic setting.
Each film is unique in its treatment, its colors, its music, the story it tells, while belonging to the same collection of dreams of artists' lives. Fleeting moments, like a flight of butterflies which brings back the tireless desire to discover another.
Les Subjective Visions, un regard d’artiste sur les artistes, le récit fictionnel de l’intimité du geste créatif.
J’ai une passion pour les documentaires. En particulier pour les films qui traitent de l’art. Malheureusement, j’y trouve très rarement ce qui m’attire vers ce sujet, à savoir le rapport de l’artiste avec son oeuvre, le cheminement de la création, perçu de l’intérieur. Souvent, le traitement d’un film sur un artiste se compose d’éléments historiques et sociaux, cousus d’analyses d’experts et de témoignages de contemporains qui échouent à capter la dimension intime de l’acte créatif. On communique sur l’artiste, plutôt que de pénétrer son univers, afin d’expérimenter, de façon organique et intuitive, la manière dont il façonne la matière, les gestes qu’il pose pour développer son oeuvre, son voyage intellectuel et émotionnel, en somme.
Mon approche documentaire fait écho à la démarche de David Hockney, dans son livre « Secret Knowledges of old masters », où le peintre parle de l’histoire de l’art, du point de vue de celui qui fait l’art, évoquant le regard des artistes sur le réel et les contraintes qu’ils rencontrent dans leur pratique. Cette volonté de dessiner un monde nouveau pour échapper au réel, cet accomplissement de la création de l’oeuvre, cette épreuve parfois, seuls les artistes en ont connaissance. Et malgré tout, ce que j’ai beaucoup vu, ce sont des artistes qui glosent sur leur travail, comme pour mieux l’inscrire dans les cases préconstruites de l’histoire de l’art.
Comment m’y prendre pour rendre à l’écran, sans bruit de fond, sans jargon intellectuel, cette démarche si singulière, dont l’artiste lui-même peine, par pudeur peut-être, à exprimer la profondeur et la sincérité? Comment montrer le doute de l’artiste, par rapport aux risques à prendre, son questionnement sur sa place dans le monde, cette danse de l’esprit créateur, visitant l’intérieur de sa psyché pour y trouver le sens de sa vie? En évitant la monographie, tout en m’appuyant sur mon expérience de photographe de portrait.
Quand je photographie quelqu’un, malgré la brièveté de la rencontre, je capte toujours un morceau de son âme, en dépit de l’image qu’il se fait de sa propre représentation aux yeux du monde. Ainsi, les Subjective Visions sont des portraits de l’artiste en artiste, de l’auteur en action plutôt qu’en métaréflexion, dans la matière de ses doutes et de sa gloire, de son combat contre le réel. Dans les Subjective Visions, pendant les quelques minutes où les artistes se livrent, une tension est saisie. Ils confient leurs stratégies pour dessiner un monde conforme à leurs rêves, lorsqu’ils sont face à la toile. Partager l’intimité de la création picturale, c’est un sujet rare. C’est faire partager la petite chanson qui trotte au fond du crâne du peintre, pendant tout le temps où il tient le pinceau. Capter ses silences, ses paroles spontanées, son rapport psychologique et philosophique à l’oeuvre, l’histoire qu’il se raconte. Bref, sa conscience. Et de cette matière, modeler un récit, qui soit suspense et passion.
Créer, pour un artiste visuel, ce n’est pas reproduire le réel, de manière automatique ou systématique, mais transposer ce qui est en trois dimensions sur un plan en deux dimensions. C’est inventer ce qui n’existe pas. C’est un choix artistique arbitraire, fruit de toutes les décisions que l’auteur prend pour sortir de l’emprise du réel et réussir son évasion du tangible. Les Subjective Visions procèdent de la même démarche. J’utilse donc la rotoscopie et le support papier pour transfigurer le portait sur un matériau permettant l’incarnation du geste sensuel et expressif.
En dehors de la présentation des oeuvres, montrées telles quelles dans les films, l’esthétique des Subjective Visions repose sur un travail d’animation image par image, sur un principe de rotoscopie. Concrètement, les prises de vues documentaires sont « live ». Ensuite, chaque photogramme du prémontage est imprimé et animé, à la main, selon une technique qui varie, en fonction de l’univers de l’artiste et du film. Il peut s’agir de déchirures comme de colorisations à l’aquarelle, etc.
Pourquoi l’utilisation du papier dans mon travail? Le peintre figure ce que le monde devrait être sur sa toile et je transpose ce geste tel que je le ressens sur papier. Ce matériau permet de retrouver l’authentique geste du peintre et du pinceau sur la toile. Contraindre le récit aux deux dimensions du papier ouvre le champ aux expérimentations visuelles qui enrichissent l’histoire de nouvelles dimensions sur le long cours. Mais les Subjective Visions ne sont pas juste un joli écrin esthétique pour livrer un témoignage, elles participent à la création du récit fictionnel de l’art. L’artiste face à la création doit être montré comme une aventure obsessionnelle, une histoire pour tous, celle de la quête du héros, dans un cadre plastique extraordinaire.
Chaque film est unique par son traitement, ses couleurs, sa musique, l’histoire qu’il raconte, tout en appartenant à la même collection de rêves de vies d’artistes. Des instants fugitifs, comme un envol de papillons qui ramène au désir inlassable d’en découvrir un autre.